Le Cercle des Européens...
Pour une Europe réunie...
Si le couple franco-allemand reste selon lui "structurant" au sein de l’UE, Laurent Wauquiez a soutenu le besoin pour la France de "construire des coalitions plus ouvertes".
Le Ministre a débuté son intervention en soulignant un paradoxe dans la situation actuelle : d’un côté "nous n’avons jamais eu autant besoin d’Europe", d’un autre côté, celle-ci "n’a jamais fait l’objet d’autant de défiance". Regrettant que les pro-européens aient "désertés le champ de bataille" après le référendum sur le traité constitutionnel de 2005, il a appelé à "reprendre le drapeau" et à redonner aux Français "envie d’Europe".
Le Ministre a exprimé sa méfiance face à la tentation de repli national et dit vouloir lever les doutes et les réserves à l’égard du projet européen. Un sentiment en effet susceptible de grandir au sein de l’opinion publique française, alors que certains responsables politiques ont d’ores et déjà placé la sortie de l’euro au centre de leur discours dans la perspective des présidentielles de 2012. "Face à des problématiques globalisées, l’approche nationale étroite n’a plus de sens", a déclaré Laurent Wauquiez.
C’est un Ministre déterminé à répondre aux préoccupations des citoyens et à placer la France au cœur d’une "Europe à l’offensive" qui s’est présenté devant les membres du Cercle.
Cette foi dans le projet européen n’est toutefois pas dénuée d’un certain regard critique vis-à-vis de l’Europe telle qu’elle a pu se construire ces dernières années. Laurent Wauquiez a ainsi dénoncé à demi-mot un libéralisme à tout crin et invité les responsables européens à "changer de logiciel". La crise a dans ce sens permis une "profonde évolution des mentalités" et 2011 ouvre à présent une fenêtre d’opportunité pour "construire l’Europe post-crise".
Revenant sur la crise qui secoue la zone euro depuis près d’un an et faisant indirectement référence aux hésitations de certains pays membres - dont en premier lieu l’Allemagne, au moment de la gestion de la crise grecque - Laurent Wauquiez a salué le consensus qui s’était finalement dégagé autour "de la défense conjointe de l’euro". S’il a fallu six mois pour prendre la décision de venir en aide à la Grèce, quinze jours ont suffi pour mettre en place un plan de soutien à l’Irlande. Une capacité de réaction accrue de la zone euro, rendue possible grâce à la création du mécanisme européen de stabilisation financière. En révélant "les faiblesses congénitales de la monnaie unique", cette crise a donné lieu à un important renforcement institutionnel des structures de la zone euro. Lors du Conseil européen de décembre 2010, les Etats membres décidaient ainsi de modifier le Traité afin de créer un mécanisme permanent pour en assurer la stabilité financière.
Souhaitant poursuivre dans cette voie, le Ministre a prôné "un approfondissement de la zone euro" dans plusieurs directions :
- en matière fiscale, avec l’instauration d’une base commune pour l’imposition des société (le projet ACCIS – Assiette commune consolidée sur l’impôt des sociétés – que la présidence française s’était résignée à remettre dans les cartons pour ne pas compromettre les chances de victoire du "oui" au second référendum irlandais sur le traité de Lisbonne et qui est revenu au devant de l’actualité à la faveur de la crise irlandaise et du débat sur les écarts de compétitivité au sein de l’UE) ;
- en matière de coordination budgétaire avec le semestre européen ;
- et en matière de politiques macroéconomiques communes, en menant par exemple des efforts conjoints dans le domaine de l’innovation. Pour Laurent Wauquiez, les avancées réalisées à l’occasion de cette crise permettent de réconcilier les conceptions allemande et française de la monnaie unique ; l’une reposant sur la Banque centrale européenne et la discipline budgétaire, l’autre sur le besoin de gouvernance économique.
Puisque l’emploi et l’économie constituent les deux plus grandes préoccupations des citoyens, l’Europe doit également porter tous ses efforts sur ces deux thèmes, a affirmé le Ministre. L’innovation constitue le principal levier de compétitivité et de création d’emplois. Laurent Wauquiez a dénoncé la grande complexité des programmes communautaires, pour la plupart inaccessibles aux PME, l’insuffisance de la coordination entre les Etats mais aussi entre instruments européens, la faible mobilité des chercheurs. Il a défendu la création d’un fonds européen de capital-risque et d’un fonds européen des brevets afin de donner aux entreprises les moyens financiers d’innover et de valoriser les résultats de la recherche.
Sur la question du brevet européen, le Ministre a toutefois souligné que l’UE était parvenue à débloquer un dossier vieux de 30 ans suite à la proposition de dix Etats, dont la France, d’instaurer une procédure de coopération renforcée . L’année 2011 doit correspondre à "une initiative forte de l’Europe en matière de politique d’innovation", a exhorté Laurent Wauquiez.
L’autre thème sur lequel le Ministre a souhaité mettre l’accent est celui de la politique commerciale. Un "sujet difficile" à aborder pour la France à qui colle "une image de pays protectionniste", mais néanmoins crucial dans un contexte de compétition mondiale accrue.
"Comparée aux autres régions du monde, l’Union européenne est celle qui pratique le libre-échange le plus dogmatique et le plus naïf", a soutenu Laurent Wauquiez. Il a ainsi pris pour exemple les Etats-Unis, excellents pour protéger leurs champions sur leur territoire ; le Japon, qui n’hésite pas à instaurer des barrières non tarifaires ; le Brésil au sein duquel il est impossible pour une entreprise étrangère de développer une filiale sans avoir au préalable une filiale, un patron et des capitaux brésiliens ; ou encore la Chine dont les marchés publics sont totalement fermés aux entreprises européennes – une pratique d’autant plus choquante que l’UE ouvre ses marchés publics à 80% et que la Chine y remporte par ailleurs de juteux contrats.
Face à cette situation, Laurent Wauquiez a plaidé pour l’application du principe de réciprocité. "Il ne s’agit pas d’un principe de protectionnisme", s’est-il défendu, "mais de libre échange visant à s’assurer que les autres pays ouvrent les portes de leur commerce". Il s’agit pour l’Union européenne de prendre conscience que son principal atout dans la mondialisation réside dans son marché intérieur, et de l’utiliser comme levier de négociation.
"Comme toute construction politique, la raison d’être de l’Union européenne est d’apporter un surcroît de force et de protection lorsque c’est nécessaire", a ajouté le Ministre pour conclure sur ce point.
Cette affirmation vient d’un Ministre des Affaires européennes des plus germanophiles – et germanophones – qui déclare être "empreint de culture allemande" et qui a réservé sa première visite officielle à Berlin. Tout en soulignant "l’importance structurante" de la relation franco-allemande – "à la base de toutes les grandes avancées" - Laurent Wauquiez a affirmé que dans une Union élargie, elle ne suffisait plus. Il est aujourd’hui impératif de construire "des coalitions plus ouvertes". Il a ainsi dit vouloir accorder une place particulière aux pays d’Europe centrale, regrettant que la France n’ait pas suffisamment investi dans cette partie de l’Europe.
Le Ministre a en quelques mots donné la ligne directrice de son action :"La France doit jouer collectif" afin de retrouver un rôle moteur dans la construction européenne et "soutenir une Europe à l’offensive".
Laurent Wauquiez a enfin souhaité attirer l’attention sur le besoin pour l’Europe d’assumer et de revendiquer les valeurs, les figures emblématiques, les grands moments culturels et historiques qui sont le fondement de son identité. Cette remarque n’est pas étrangère à la polémique née suite à l’édition par la Commission européenne d’un agenda 2011-2012, distribué aux élèves du secondaire des 27. Visant à faire la promotion des différentes cultures et religions, celui-ci a très maladroitement oublié de faire toute référence au christianisme. Or, l’agrégé d’histoire a rappelé que "l’un des puissants leviers de construction de l’Europe avait été le mouvement de christianisation". "L’ouverture aux autres ne suppose pas de nier sa propre identité", a-t-il ajouté.
Le Ministre a en effet regretté de manière générale que les documents de la Commission européenne donnent trop souvent le sentiment d’une Europe "sans racine, sans soubassement civilisationnel, et sans origine culturelle".
Revenant sur l’affaire de l’agenda, Laurent Wauquiez a souligné que cette polémique n’était pas accessoire dans le sens où elle avait un fort impact sur l’opinion. "Une identité qui n’est pas assumée est une identité qui se venge", a-t-il ajouté en guise de mise en garde.
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