Le Cercle des Européens...
Pour une Europe réunie...
Selon le Commissaire, "la santé doit aussi être considérée du point de vue de ses opportunités économiques". Interrogé sur le scandale du Médiator, John Dalli a mis en avant les nouvelles règles européennes en matière de pharmacovigilance.
Il a enfin placé l’instauration d’un recours collectif européen au cœur de son action pour renforcer la confiance des consommateurs dans le marché unique.
Membre de la Commission européenne depuis février 2010, après avoir exercé des fonctions ministérielles à Malte durant près de 20 ans (voir cv), John Dalli, a tenu à jeter un regard rétrospectif sur cette première année en fonction. Homme politique des plus expérimentés sur le plan national mais certes novice au niveau européen, il s’est présenté aux membres du Cercle des Européens comme ouvert aux critiques et soucieux d’améliorer son action.
Il a tout d’abord souligné les contraintes inhérentes à sa fonction. La première est liée aux compétences limitées de l’Union européenne en matière de santé et de politique des consommateurs, puisque celle-ci intervient uniquement en complément de l’action des Etats membres. La seconde contrainte est liée au système institutionnel européen. "Mon rôle et mon action de Commissaire évoluent entre un Parlement européen qui vous pousse à faire sans cesse davantage et des Etats membres qui vous freinent", a souligné John Dalli avant d’ajouter : "les réponses ne sont donc jamais faciles".
Cette découverte du rôle de Commissaire et l’apprentissage du fonctionnement de l’Union européenne lui a livré un premier enseignement : "l’Union européenne n’est pas la panacée. Elle ne dispose pas des instruments pour répondre à tous nos problèmes". L’action européenne s’avère en revanche "irremplaçable" lorsqu’elle vise à favoriser la coopération entre les Etats et à créer des synergies. "Nous n’avons pas nécessairement besoin de plus d’Europe, mais d’une Europe plus forte", a déclaré le Commissaire en insistant sur le besoin d’avoir une action plus ciblée et plus efficace. Cela ne passe pas uniquement par la voie législative. L’échange de bonnes pratiques et le dialogue étroit avec les Etats membres et les consommateurs s’avèrent tout aussi cruciaux dans cette recherche d’efficacité. John Dalli a enfin mis l’accent sur le besoin d’évaluer constamment l’impact de l’action de l’UE, pour mieux agir.
Confronté dès son entrée en fonction à la "pandémie" de grippe A (H1N1) (qualifiée comme telle par l’OMS en juin 2009), le Commissaire a mis en avant le besoin d’améliorer et de renforcer le rôle de l’UE dans la gestion des crises sanitaires. "Il serait ridicule de penser que les Etats peuvent agir seuls face à des problèmes qui relèvent de notre bien être commun". L’UE ne peut pas tout faire, mais voilà un domaine dans lequel son action apporte une "véritable valeur ajoutée".
Si la pandémie de grippe A a constitué "un test de la capacité de réponse de l’UE", le bilan est mitigé. Grace aux importants investissements réalisés depuis des années dans le domaine médical, les Etats sont parvenus à contenir la pandémie. Le Comité de sécurité sanitaire a par ailleurs adopté de nombreuses consignes, en matière de vaccination des groupes à risques, de fermetures d’écoles ou de conseils aux personnes infectées (Cf Dossier Grippe A – coordination au niveau de l’UE). En revanche, le Commissaire a reconnu d’importants problèmes nés des différentes stratégies nationales de vaccination, des difficultés d’approvisionnement en vaccins ou de leur différent prix d’achat au sein de l’UE. C’est pour répondre à ces dysfonctionnements que la Commission étudie aujourd’hui la possibilité de créer un mécanisme commun de vaccination et de distribution d’anti virus, activable dans le cadre d’une pandémie. Si les Etats se sont montrés par la passé opposés à une telle approche commune, John Dalli s’est dit persuadé que "l’expérience douloureuse" de la grippe A aura permis de faire évoluer les positions. La communication envers les citoyens devra également être améliorée.
Les deux grandes priorités que s’est fixé le Commissaire correspondent "à deux évolutions majeurs de notre société", pour lesquelles il est indispensable de développer "une approche globale de la santé".
Le premier dossier concerne l’obésité. Bien qu’ayant prouvé son efficacité durant ces dernières années, la lutte contre les maladies cardiaques sera incomplète tant que l’on ne s’attaquera pas au problème grandissant de l’obésité, a affirmé John Dalli. Ce dernier a mis l’accent sur la prévention : "Il ne suffit pas de dépenser des millions dans de nouveaux traitements, il faut avant tout investir dans la prévention. Mon principal objectif en matière de santé est de maintenir les citoyens loin des lits d’hôpitaux".
Il a cité en exemple de cette action contre l’obésité, la Plateforme d’action de l’UE sur l’alimentation, l’activité physique et la santé, qui crée en 2005, réunit la profession médicale, l’industrie agroalimentaire, les associations de santé et de défense des consommateurs. Fruit d’un travail d’analyse et d’échange de bonnes pratiques, ce forum a permis l’adoption de 300 engagements concrets en matière d’information des consommateurs, d’étiquetage, de publicité, d’éducation ou de promotion de l’activité physique. A propos de l’étiquetage, que l’UE a considérablement contribué à améliorer, le Commissaire a toutefois précisé que sans effort d’éducation, ces informations ne pouvaient être correctement interprétées par les consommateurs.
Le second dossier est celui du vieillissement. Compte tenu des projections démographiques (Entre 2010 et 2030, le nombre de personnes âgées de plus de 65 ans augmentera de 40%), le maintien en bonne santé des personnes âgées est devenu prioritaire. Cela ne concerne pas uniquement la santé publique. Ancien Ministre de l’Economie et des Finances, John Dalli a inscrit son action dans le cadre plus large de la de la préservation des systèmes de santé (à travers la maîtrise des dépenses) et du renforcement de la compétitivité au sein de l’UE. Si la santé concerne "avant tout le bien être des individus", elle doit également être considérée du point de vue de ses "opportunités économiques".
Lors du Conseil européen du 4 février 2011, les 27 ont ainsi adopté le projet pilote proposée par la Commission de Partenariat européen d’innovation pour un vieillissement actif et en bonne santé (European Innovation Partnership on Active and Healthy Ageing). Partie intégrante de l’initiative "Union pour l’innovation" (cf site dédié), ce partenariat vise à répondre aux défis du vieillissement et de la santé publique par le développement de nouvelles technologies, de produits et de services innovants. L’objectif a terme est "ambitieux" : augmenter d’ici 2020 de deux années le nombre moyen d’années vécues en bonne santé. La réussite de ce partenariat n’est pas garantie, a indiqué le Commissaire, "elle dépendra de notre capacité à rompre avec une approche cloisonnée de la santé, à réunir toutes les parties prenantes et les acteurs de la chaîne de l’innovation".
"Une politique du consommateur au service du marché unique et un marché unique au service de la politique du consommateur", telle est la ligne directrice fixée par John Dalli. Son action se base sur quatre piliers : la sécurité, l’information et l’éducation, les recours et l’application du droit.
Si la confiance est essentielle pour le développement du commerce transfrontalier, le consommateurs doit impérativement disposer de recours afin de garantir ses droits en cas de litige, a indiqué le Commissaire. Alors que le débat est ouvert depuis de nombreuses années, il a dit fermement soutenir l’idée d’un recours collectif, tout en indiquant vouloir avancer avec "prudence". "Il ne s’agit pas de reproduire le modèle de "Class action" à l’américaine", a-t-il précisé. Cette perspective avait en effet soulevé d’importantes craintes de la part des entreprises européennes. Excluant donc un recours uniquement judicaire, John Dalli défendu l’instauration d’un système européen de règlement des litiges à l’amiable. Une consultation publique sur les "modes alternatifs de résolution des conflits" ou Alternative dispute résolution (ADR) a ainsi été ouverte le 4 février. Ce système qui est promu par la Commission depuis 1998 est appliqué dans certains Etats membres ou dans certains secteurs de l’économie (comme l’énergie, les télécommunications ou les services financiers). L’objectif serait à présent de créer un cadre commun au niveau européen. Ce recours extra judiciaire qui fait intervenir un médiateur permettrait aux consommateurs de disposer d’un outil "simple, rapide, efficace et peu coûteux". Répondant indirectement aux critiques des associations de consommateurs, John Dalli a affirmé que cette procédure de règlement à l’amiable n’excluait aucunement l’instauration d’un véritable recours collectif. L’ADR pourrait en revanche constituer "une première étape obligatoire" avant le dépôt d’un recours collectif.
Interrogé sur les dysfonctionnements à l’origine du scandale du Mediator, le Commissaire a estimé que "des alertes auraient du être émises bien plus tôt" quant à la dangerosité de ce médicament. L’Agence européenne du médicament aurait-elle du se saisir de ce dossier alors que le Mediator était retiré du marché en Italie et en Espagne dès 2003 ? Pour le Commissaire, la responsabilité est avant tout celle de l’Agence française du médicament (l’Afssaps) qui a autorisé sa commercialisation jusqu’en novembre 2009. Il a également regretté que des demandes d’information complémentaires n’aient pas été suivies d’effets. L’Agence européenne avait elle-même demandé une étude au laboratoire Servier sur l’efficacité du rôle du benfluorex (principe actif du Médiator) ; demande restée sans suite ou selon certains, dont les résultats n’ont pas été rendus publiques.
Le Commissaire a par ailleurs rappelé qu’une nouvelle législation européenne concernant la pharmacovigilance avait été adoptée à la fin de l’année 2010 (règlement adopté par le Parlement européen le 22 septembre 2010) dans le but de renforcer la surveillance des médicaments (qui seront surveillés durant 5 années après leur mise sur le marché, avec la création d’un site Internet dédié), l’échange d’informations, ainsi que les procédures d’alertes quant aux risques et aux effets indésirables des médicaments (responsables de près de 200 000 décès par ans dans l’UE). Alors que cette législation entrera en vigueur en juillet 2012, John Dalli a annoncé avoir demandé à ses services une étude pour savoir si ces nouvelles mesures auraient permis d’éviter le scandale du Médiator. Il s’agira d’un bon indicateur pour savoir si ces règles sont suffisamment efficaces, a-t-il ajouté.
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